Les objectifs de l’eutonie

L’eutonie vise le développement de notre sensibilité aux variations toniques. Il devient possible d’influencer notre propre tonus en utilisant les moyens qu’offre l’eutonie.

Le tonus exprime notre état physique, mais aussi psychique, et percevoir ses variations, c’est-à-dire les activités, les tensions et le relâchement, permet aussi de mieux nous connaître. Nous pouvons de la sorte réguler notre tonus. Le corps est ainsi plus aisément disponible pour répondre de façon appropriée aux différentes situations que nous vivons.

Ainsi, l’eutonie est une éducation de soi qui s’adresse à toute personne, quel que soient son âge, son état de santé ou son degré de compréhension. Le professionnel est capable de s’adapter à son public, il est un pédagogue chargé d’offrir des outils à ses élèves. Ces outils sont les principes de l’eutonie : étirement, toucher, contact, repousser, transport osseux… qui sont alors à disposition au quotidien pour fluidifier le mouvement, se défaire des activités inutiles, favoriser la posture et libérer l’expression.

C’est aussi un apprentissage pour la gestion du stress, la prévention de la fatigue et de certaines douleurs.

Le travail à deux, possible pour des élèves déjà initiés, est aussi une merveilleuse opportunité de s’ouvrir à la réalité de l’autre. C’est l’occasion d’apprendre à écouter les messages corporels, à accorder son geste à celui de l’autre, tout en restant conscient de soi-même.

Dans le travail en groupe, la part d’échanges et de partages qui est proposée permet de se rendre compte des différences entre sa propre réalité corporelle et celle des autres.

En eutonie, un tonus équilibré est un tonus capable de s’ajuster, c’est-à-dire de s’harmoniser, de s’élever ou de s’abaisser selon les situations.

Par exemple, le tonus s’élève quand il y a difficulté et peut se fixer dans des crispations ou tensions, en cas de conflits relationnels ou psychiques, en cas de surmenage musculaire et dans toute atteinte à l’intégrité de l’organisme, même au niveau métabolique.

Ainsi on observe que l’eutonie améliore l’état de santé général en jouant sur le système neuro-végétatif qui régule notre activité musculaire inconsciente. Après une séance, le sommeil est meilleur, le corps semble plus léger ou plus habité, plus disponible, qu’il s’agisse d’une séance individuelle ou collective.

La vigilance de l’élève est requise à tout moment : il suit, de son point de « vue », l’évolution de son état corporel par l’écoute de ses sensations. Et il reste « élève », même en séance individuelle, car il est supposé apprendre de la situation, y participer activement.

En suivant de façon subtile et attentive les modifications toniques, l’eutoniste observe que par son toucher, par des mobilisations passives, par l’orientation de l’attention, de nombreux changements ont lieu. La personne-élève témoigne souvent que ses troubles ont régressé : sensations douloureuses réduites, meilleur équilibre, gestes plus aisés, sommeil plus profond, stations debout ou assise plus confortables. Les effets sont multiples, car le rééquilibrage a lieu en conséquence des situations proposées, selon les besoins de l’organisme et dans un déroulement parfois difficile à anticiper.

Les prises de conscience sont souvent l’occasion de changer des habitudes, de trouver une relation nouvelle à son corps.

La libération des tensions, une appropriation plus vivante et consciente de son espace corporel, correspondent à une ouverture de la gamme tonique.

Un jeu musculaire plus aisé s’accompagne d’une plus grande disponibilité. Une station debout facile permet une grande liberté dans le geste. Ainsi, l’eutonie est précieuse pour les personnes voulant ouvrir leur champ créatif dans les domaines où le corps est directement concerné : la danse, le chant, le travail de l’acteur, la musique, mais aussi dans des registres tels que l’écriture, le dessin, la peinture ou la voix. Car la flexibilité tonique reflète aussi la fluidité de la pensée, la mobilité de l’attention consciente. Cela influence la qualité de présence sur scène.

En eutonie, le mouvement et les positions proposées ne sont jamais démontrés. La personne est invitée à rechercher une sensation, l’étirement des chevilles par exemple, de façon personnelle, à son rythme et en allant vers ce qui est ressenti comme agréable ou bienfaisant, donc de manière créative.

Cette créativité peut être visée en tant que telle. La recherche du geste juste à un moment donné crée un mouvement inédit, particulièrement savoureux pour la personne qui l’exécute, totalement improvisé, sur différents thèmes de l’eutonie (improvisation de toucher ou d’étirement, par exemple). On peut aussi en faire une « étude », c’est-à-dire le mettre en forme pour lui-même, créant ainsi une petite chorégraphie qui reflète son état du moment, tout en cherchant à habiter pleinement son corps.